Cinq chefs et adeptes de la bonne chère issus des cinq régions du Canada nous transmettent leur vision unique concernant la façon de tirer parti de ces trésors de la terre pour les servir à table.
Des rivages escarpés de la Baie de Fundy sur la côte Est aux plages de sable de la baie des Anglais sur la côte Ouest, la population canadienne peut puiser dans un vaste éventail de ressources naturelles comestibles issues de la terre sur laquelle elle vit.
Le Canada s’étend sur presque dix millions de kilomètres carrés et est composé d’une mosaïque d’écosystèmes, chacun abritant ses propres trésors.
Par Renu Chandarana
Région de l’Est
Dining on the Ocean Floor dans la baie de Fundy, en Nouvelle-Écosse
Célèbre pour ses marées les plus hautes au monde, la baie de Fundy a été classée parmi les sept merveilles naturelles d’Amérique du Nord par l’UNESCO. C’est dans ce cadre idyllique qu’est né Dining on the Ocean Floor, un concept de restauration immersif haut de gamme qui repousse les limites du connu. Cette expérience hors du commun n’est offerte que huit fois par an pour un maximum de vingt convives sur réservation uniquement.
Organisés par le chef Dominic Padula et l’équipe de Food Fantastique, comme leur nom anglais l’indique, ces soupers ont véritablement lieu « au fond de l’océan » dans le parc Burntcoat Head, en Nouvelle-Écosse. Une fois que la marée s’est retirée, Padula dispose d’une fenêtre de six heures pour profiter du fond de l’océan avec ses convives. L’équipe se sert d’équipements de cuisine mobiles de pointe qu’elle installe directement sur le site. Un menu élaboré avec soin met en avant des ingrédients de premier choix issus tant de la terre que de la mer et produits dans la baie de Fundy et aux alentours.
« (La baie) fournit une abondance de homards, de moules, de palourdes, de pétoncles et de poissons locaux, explique Padula. Ils ne passent pas plus de 48 heures sur un bateau de pêche avant que nous les apprêtions. » Des assiettes terre et mer aux choix végétariens ou végétaliens préparés de façon artistique, chaque plat est un véritable chef-d’œuvre mettant à l’honneur des ingrédients locaux.
Région du Centre
Treadwell Cuisine à Niagara-on-the-Lake, Ontario
Les 5 500 hectares de vignobles de Niagara-on-the-Lake sont entourés par le lac Ontario et le Niagara. Dans ce sol fertile, les vergers et les fermes luxuriants sont florissants, et les températures modérées de cette partie du Centre du Canada en font l’épicentre de la viticulture et de la transformation du raisin.
C’est le duo formé par Stephen et James Treadwell, un père et son fils, qui se cache derrière Treadwell Cuisine, à la fois restaurant et service traiteur. « Il y a dix ans, tout le monde nous disait que ça ne marcherait pas et que les hivers étaient morts à Niagara-on-the-Lake, raconte Stephen. Mais, à présent, notre entreprise fleurit grâce à la collaboration et au partenariat. » Son fils James, le sommelier, tisse des liens avec les producteurs de vin du coin afin de trouver l’association idéale avec les créations artistiques de son père et, plus important encore, de choisir des bouteilles qui viendront compléter leur vinothèque exclusive.
« Les meilleurs restaurants de la planète disposent des meilleurs vins du moment, ainsi que des meilleurs vins des décennies précédentes. La forte acidité des vins de cette région vieillit bien. Certains vins des années 90 sont toujours aussi frais, mais avec plus de nuances. Seule une poignée de restaurants peuvent offrir ce genre d’expérience à ses convives », s’enthousiasme Stephen. Les Treadwell préfèrent la qualité à la quantité et favorisent des vins issus de pratiques biologiques et biodynamiques avec un engagement envers la durabilité.
Région des Prairies
The Canadian Birch Company, Grand Marais, Manitoba
Glenda et Rory Hart sont les propriétaires et gérants de The Canadian Birch Company, dont les locaux se situent en bordure de forêts boréales dans le Manitoba. Bien que le Manitoba fasse techniquement partie de la région des Prairies, plus des trois quarts de la province appartiennent aussi à la région boréale canadienne. La sève des bouleaux de la forêt boréale peut être récoltée, puis transformée en un sirop ambré et sucré.
La famille Hart a recours au procédé de l’osmose inverse pour transformer 150 unités de sève de bouleau en 1 unité de sirop. Le sirop d’érable produit un rendement bien plus élevé avec un ratio de 40 pour 1. De ce fait, le sirop de bouleau est un produit bien plus exclusif vendu en plus petites quantités. Le sirop de bouleau est utilisé avec parcimonie comme touche finale ou, comme pour la vanille, on peut aussi s’en servir pour cuisiner, car il fait ressortir les saveurs des autres ingrédients dans un plat.
« C’est un ingrédient bien utile en cuisine, » explique Glenda. « Il aide à faire en sorte que tout se tienne. » Le couple produit des variétés de sirop de bouleau doré, ambré et foncé qui offrent chacune une profondeur différente en matière de saveur.
Région du nord
Sundog Café, Yellowknife, Territoires-du-Nord-Ouest
Yellowknife vous permet de partir à l’aventure directement dans le garde-manger de Mère-Nature. S’intéresser à la cueillette permet de découvrir la riche mosaïque d’herbes sauvages et de plantes comestibles qui poussent dans la région. Le chef Calvin Rossouw tire parti des profils aromatiques uniques des plantes pour créer de délicieuses crèmes glacées gourmet au Sundog Trading Post Café.
En 2021, il a ouvert la partie café de Sundog Trading Post, une entreprise axée sur le tourisme d’aventure. Lorsque la COVID a obligé l’entreprise à mettre sur pause ses activités touristiques, Rossouw a commencé à laisser libre cours à sa créativité. Les saveurs de crème glacée qu’il propose reposent principalement sur la nature. « Vous pouvez facilement partir en forêt et vous nourrir de ce que vous y trouvez, » explique Rossouw. « mes voisins vont cueillir des plantes et me ramènent leurs trouvailles. »
Les saveurs de ses crèmes glacées sont élaborées à partir de plantes et de baies comme la rhubarbe sauvage, la menthe, la viorne comestible et la viorne trilobée, ainsi que les très prisées feuilles de thé du Labrador, une petite plante odorante connue des communautés autochtones pour ses propriétés curatives. Le Sundog Trading Post Café représente un harmonieux mélange de créativité culinaire et de charme nordique.
Région de l'Ouest
Salmon n’ Bannock, Vancouver, Colombie-Britannique
Le fleuve Fraser, élément vital des Basses-terres continentales, est la plus grande source d’approvisionnement en saumon rouge du monde et un acteur important dans l’approvisionnement en saumon rose, kéta, chinook, coho et arc-en-ciel.
C’est lorsqu’elle a ouvert le premier restaurant autochtone en son genre en 2010, le Salmon n’ Bannock, que la restauratrice Inez Cook s’est mise à développer un vif intérêt pour le saumon local. Alors qu’Inez traversait une période difficile, elle s’est mise en route pour Kelowna. Bouleversée, le regard trouble, dans la vitrine d’un restaurant, elle a aperçu un panneau qui disait : « Pas de panique, on a de la bannique! ». Il a suffi à Inez d’une bouchée de bannique pour que son esprit s’apaise. Victime de la rafle des années soixante, Inez a été élevée par des parents adoptifs dans une famille non autochtone. Le goût de la bannique lui a rappelé sa famille biologique.
Guidée par sa communauté, elle a commencé à mettre en avant les riches traditions culinaires des peuples autochtones du Canada par l’intermédiaire de plats intégralement élaborés et servis par du personnel autochtone. Inez propose des plats tels que de la mousse de pemmican, du saumon confit et de la morue charbonnière fumée. « Je demande à mes employé·e·s ce qu’ils/elles mangeaient quand ils/elles étaient enfants et quels sont les aliments importants à leurs yeux. Je vois ce restaurant comme une tribune permettant de donner une voix aux plus de 200 nations autochtones de la Colombie-Britannique. »
Votre région culinaire canadienne préférée vous attend.
Photos sont une gracieuseté de BC Content Hub, Food Fantastique, Indigenous Tourism BC, Salmon n’ Bannock, Sundog Trading Post Café et Treadwell Cuisine.